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À la croisée du pilotage stratégique, de la coordination opérationnelle et du shadow management, le poste de Chief of Staff attire de plus en plus d’Alumni en quête d’une forte proximité avec la direction générale et d’une courbe d’apprentissage accélérée.
Pour mieux comprendre ce rôle, nous avons rencontré Gauthier Riesi, Partner chez 359 The Chief of Staff Company, un cabinet spécialisé dans ce type de recrutement. Il nous dévoile les coulisses du poste, les profils recherchés et donne ses conseils aux candidats intéressés par cette voie.
Pouvez-vous nous présenter votre parcours ? Pourquoi avoir choisi de vous spécialiser dans le recrutement de Chiefs of Staff ?
Nous avons créé 359 il y a deux ans. Avant cela, Pascaline Bertaux et Thomas Breuil, mes associés, avaient assuré des fonctions de Chief of Staff, pour ma part, j’ai évolué pendant une dizaine d’années dans l’univers du recrutement, notamment dans la Tech.
Cette idée est naturellement née d’échanges et de discussions que nous avions avec dirigeants et candidats, qui s’interrogeaient sur ce rôle et ce qu’il recouvrait. Il y avait clairement quelque chose à faire pour devenir l’entreprise qui promeut, éduque et évangélise autour de ces missions.
Notre accompagnement commence très tôt, en amont des recrutements, pour comprendre et identifier les besoins du dirigeant. Aujourd’hui, notre positionnement se décline autour de trois grandes activités : le recrutement de profils en CDI, le placement de freelances et l’accompagnement par le mentorat et la formation.
Le rôle de Chief of Staff peut sembler flou. Comment le définissez-vous et le voyez-vous évoluer ?
Le terme de Chief of Staff est assez récent en France – on l’adopte aujourd’hui principalement dans certains environnements corporate ainsi que dans l’univers des start-up et scale-up tech. À l’origine, c’est un terme qui nous vient de l’armée américaine et qui est rapidement passé dans le privé. Il regroupe des missions historiquement couvertes par le secrétaire général, le directeur de la stratégie, de la transformation ou encore le CEO Office.
Le choix du profil qui assurera ce rôle peut être très différent en fonction des contextes : on peut privilégier quelqu’un de très complémentaire au dirigeant pour qu’il apporte un regard différent, ou au contraire quelqu'un qui partage une approche et une vision communes. On utilise souvent l’image de la « courroie de transmission » ou de la « tour de contrôle » pour désigner le Chief of Staff.
Concrètement, il assure plusieurs missions essentielles :
Être un sparring partner ou boxing coach – avec confidentialité et confiance, il instaure une relation de pair à pair pour challenger le dirigeant.
Accompagner la gouvernance de l'entreprise, la rendre la plus efficiente et simple en accompagnant son dirigeant, mais aussi l’ensemble du Comex et faciliter l’alignement.
Proposer et suivre les bons indicateurs de performance, rendre l’information intelligible et l’utiliser pour émettre des recommandations stratégiques.
Piloter en direct certains projets complexes ou prospectifs (en fonction de la taille de l’organisation : M&A, expansion internationale ou innovation).
Garantir une communication interne et externe cohérente, en étant parfois directement la plume du dirigeant.
À quel moment une entreprise a-t-elle vraiment besoin d'un Chief of Staff ?
Un Chief of Staff devient particulièrement précieux dans des contextes de forte croissance, lorsque l’entreprise traverse une phase cruciale de changement ou de crise. Il est également à envisager lorsque le dirigeant est submergé, qu’il perd pied avec son organisation ou lorsqu’il y a un besoin évident de renforcer l’alignement et la coopération au sein de l’équipe dirigeante.
Quelles compétences recherchez-vous prioritairement chez les candidats ?
Les compétences que nous recherchons peuvent différer d’un recrutement à l’autre, en fonction du dirigeant ou des spécificités de l’entreprise. Toutefois, un tronc commun de compétences existe dans la plupart de nos missions.
Nous privilégions avant tout une forte sensibilité business et une compréhension holistique de l'entreprise, un sens irréprochable de l’organisation et une capacité à être multi-tâches. Le Chief of Staff doit également être un bon communicant, capable d’interagir efficacement avec des interlocuteurs variés à tous les niveaux de l’entreprise.
Une aptitude solide en gestion de projet et une réelle aisance analytique sont également indispensables. Un des défis principaux du Chief of Staff est enfin de faire comprendre son rôle au sein de l’entreprise. En bref, c’est un véritable caméléon : fédérateur, agile, analytique et humain.
Quel est le profil type du Chief of Staff ? Quelle part d’entre eux vient du conseil en stratégie ?
En France, les profils recrutés sont souvent de hauts potentiels issus de parcours élitistes, passés par le conseil en stratégie pour 50 à 60 % d’entre eux. D’autres sont issus de parcours d'évolutions internes, aux parcours parfois plus atypiques. Par ailleurs, plus une entreprise est mature, plus elle recherchera des profils expérimentés pour ce rôle. Aux Etats-Unis, le profil type du Chief of Staff est différent : on y a plus souvent recours à des profils issus du business, plus seniors.
En quoi un ancien consultant du BCG fait-il un bon candidat pour cette fonction ?
De bons communicants, aux solides capacités relationnelles – ce sont clairement des signatures BCG, ainsi que des qualités très recherchées pour ce rôle. Le socle généraliste acquis lors de leurs années de conseil les a dotés d’une excellente compréhension du business – à la fois rapide et en profondeur. Je leur conseille néanmoins de bien valoriser leurs compétences analytiques et leur aisance avec les données chiffrées, à mettre en avant dès les premiers entretiens.
Et après, comment capitaliser sur cette expérience pour évoluer ?
Le poste de Chief of Staff constitue un véritable tremplin, à l’image d’un MBA opérationnel. Il permet aux consultants de comprendre les problématiques opérationnelles, avec une implication plus forte et un suivi des projets sur le long cours. Cela répond d’ailleurs à ce que beaucoup d’entre eux recherchent en quittant le conseil. Un tel poste est occupé généralement entre 2 et 4 ans.
Deux types d’évolutions sont ensuite possibles : accéder, d’une part, à des postes de gestion de P&L en prenant la responsabilité d’une business unit, d’un pays ou d’un new business - c’est la voie la plus exploitée. Dans certains cas, le rôle de Chief of Staff permet d’évoluer vers une direction fonctionnelle.
Comment voyez-vous évoluer le rôle de Chief of Staff dans les années à venir ?
Il y a encore beaucoup à faire sur cette fonction – dans la lignée des US où les dirigeants disposent de façon systématique de leur Chief of Staff tout comme de leur coach personnel par exemple. Ce rôle va donc s'installer dans les organisations de façon durable en France. Le bon test est d’ailleurs d’observer que ces postes sont renouvelés, ce qui démontre leur pertinence.
L’enjeu de demain va être de développer également ce rôle dans des environnements late adopters, comme les ETI ou les entreprises familiales, qui sont encore réfractaires à ce type de profils et ont du mal à les projeter en interne.
Enfin, là où il y a encore beaucoup à faire, c'est sur l'accompagnement des Chief of Staff dans la suite de leur parcours de carrière.
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